Analyse réalisée par Eva Cottin

Le tabou fait régner l’ordre : ne pas parler d’une réalité, c’est permettre qu’elle soit ignorée, ne pas parler d’un problème, c’est s’éviter d’avoir à s’y confronter et à y remédier. Or, quand on parle des « problèmes » qui apparaissent dans la période suivant l’accouchement, on les renvoie à une problématique individuelle, détachée de tout contexte social, comme si la personne qui mettait au monde un enfant avait l’entière responsabilité de tout ce qui se passe après. Il s’agit d’une injustice dans une société qui pousse encore les femmes à un destin reproductif, valorise et glorifie en apparence ce rôle, tout en ignorant totalement les réels besoins des mères, se déresponsabilisant de l’éducation de l’enfant et du soin de celles qui ont donné naissance.

Le post-partum est une période compliquée d’adaptation physique, psychique et organisationnelle, marquée par la fatigue et la vulnérabilité. Et pourtant, s’il ne ressemble pas à une photo de magazine lisse et brillante, le vécu de la maternité semble être tabou dans nos sociétés occidentales. Sur les réseaux sociaux, la parole s’est récemment libérée : les mères témoignent sans euphémisme des difficultés non-anticipées et du sentiment de solitude. Surtout, elles s’interrogent : Pourquoi personne ne m’en avait parlé ? Suis-je la seule à vivre ça ? Nous posons à notre tour ces questions dans cette analyse : pourquoi existe-t-il un tel tabou autour du vécu du post-partum ? Comment se manifeste-t-il et quelles en sont les conséquences ?