En cette journée mondiale de la justice sociale, Solidaris et son réseau associatif (Latitude Jeunes, ASPH, FPS, Espace Seniors & FCPF) tiennent à mettre en lumière leurs principales revendications afin d’améliorer la justice sociale en Belgique. Explications.  

La protection sociale – historiquement élevée en Belgique – peine de plus en plus à offrir des prestations suffisantes à l’ensemble des citoyens. Les inégalités en termes de santé et de bien-être se creusent comme en témoignent de récentes analyses de Solidaris[1]. On assiste en effet à un appauvrissement de la population : un Belge sur six est désormais en situation de risque de pauvreté ou d’exclusion sociale selon les derniers chiffres disponibles au niveau de l’enquête européenne EU-SILC[2]. Quant au risque de pauvreté monétaire, il a atteint son niveau record depuis le lancement de l’enquête en 2004.

On fait également le constat d’une diminution de l’efficacité de la protection sociale, en particulier pour la population en âge de travailler et les familles avec enfants (surtout les ménages (quasi) sans emploi). Ainsi, les allocations sociales apparaissent inadéquates pour ces dernières avec un taux de risque de pauvreté dépassant les 80%[3]. D’une manière générale, la plupart des minima des allocations sociales restent aujourd’hui sous le seuil de pauvreté.

Par ailleurs, le montant d’un grand nombre de prestations sociales dépendent toujours de la situation familiale de la personne : une personne ayant le statut de cohabitant bénéficie de prestations dont le montant est inférieur en raison de son appartenance à un ménage. A noter que parmi les personnes ayant le statut de cohabitant, on retrouve notamment les femmes qui bénéficient généralement plus des allocations sociales. En d’autres mots, la discrimination entre isolés et cohabitants persiste de sorte que le faible niveau des prestations octroyées aux cohabitants a pour effet d’augmenter le risque de pauvreté de ces personnes. Concrètement, si nous prenons l’exemple du secteur des indemnités : aujourd’hui, une personne avec charge de famille recevra (au minimum) 1.338€/mois, un isolé 1.071€/mois alors qu’un cohabitant touchera seulement 918€/mois.

Enfin, dans le domaine de la santé, différents dispositifs existent au sein de la Sécurité sociale pour améliorer l’accessibilité des soins de santé et ciblant les ménages à faibles revenus ou les ménages ayant des dépenses de santé élevées. Mais certains de ces droits ne sont pas octroyés de manière automatique, comme dans le cas de l’intervention majorée par exemple, de sorte qu’on observe un non recours important.

Face à ces constats, Solidaris affirme à nouveau sa volonté de faire progresser la justice sociale en se basant sur la Déclaration universelle des droits de l’homme – « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits » – qui ne laisse pas de place à une différence de traitement des personnes en fonction de leur origine sociale, leur contexte de vie, leur situation familiale, leur besoin en soins de santé, leur maladie, ou handicap.

Solidaris recommande de renforcer notre système de Sécurité sociale afin que tout un chacun puisse vivre dignement et avoir accès à ses droits. Pour ce faire, la Mutualité Solidaris et son réseau avancent 4 pistes concrètes issues de son Mémorandum :

  1. La mise en œuvre de l’individualisation des droits sociaux pour tous, à commencer par un alignement du statut de cohabitant sur celui de personne isolée, notamment dans le secteur des indemnités. Pour rappel, l’individualisation des droits, c’est ne plus tenir compte de la situation familiale (isolé vs cohabitant vs chargé de famille) pour l’attribution et le calcul de différentes allocations sociales.
  2. Le relèvement des allocations sociales minimales jusqu’à 10% au-delà du seuil de pauvreté. Dans le secteur des indemnités par exemple, il est inadmissible que la maladie et l’arrêt forcé d’une activité professionnelle débouchent sur la précarité. Solidaris propose donc de relever les indemnités minimales jusqu’à 10% au-delà du seuil de pauvreté actualisé dès le premier jour d’incapacité de travail afin de permettre une revalorisation suffisante des indemnités pour maintenir le pouvoir d’achat des personnes en incapacité de travail primaire et qu’elles puissent mener une vie conforme à la dignité humaine.
  3. L’automatisation des droits sociaux avec l’octroi automatique de l’intervention majorée (cf. statut BIM) et les droits dérivés comme les réductions d’impôts et du précompte immobilier. Dans le cas de l’intervention majorée, plus de 2 millions de Belges bénéficient du statut de bénéficiaire de l’intervention majorée (soit près de 20% de la population), c’est-à-dire que les ménages à faibles revenus respectant certaines conditions (avantage social ou examen de revenus) ont droit à une intervention majorée de l’assurance maladie et dès lors à un ticket modérateur réduit sur une série de prestations de soins. Mais on estime que quelque 500.000 personnes ne bénéficieraient pas de cet avantage alors qu’elles en ont pleinement le droit. De nombreuses personnes qui sont dans les conditions du BIM n’en profitent donc pas alors que dans le même temps le report de soins reste important parmi certaines catégories de populations[4].
  4. Refinancer la Sécurité sociale. Pour financer ces objectifs sociaux urgents et prioritaires, tout en répondant aux défis liés à l’évolution normale des besoins sociaux découlant du vieillissement, il faut un financement stable et équitable de la Sécurité sociale. Or, avec l’accroissement des réductions de cotisations patronales dans le cadre du Tax Shift et la multiplication des possibilités d’échapper aux cotisations normales via les avantages extra-légaux on assiste à un définancement de la sécurité sociale : il y a un décalage entre la croissance de la masse salariale et les recettes de cotisations. La perte de recettes en cotisations doit être intégralement compenser par un financement alternatif (comme une meilleure taxation des produits financiers). Pour Solidaris, justice sociale rime avec justice fiscale. Mais la sécurité sociale aura aussi besoin de plus de moyens en raison du vieillissement de la population. Le financement de la Sécurité sociale doit donc aussi évoluer pour répondre à l’augmentation des besoins sociaux découlant du vieillissement. Il faudra prévoir de nouvelles recettes qui font contribuer tout le monde de manière équitable. La protection sociale des citoyens est essentiellement financée par les cotisations de sécurité sociale d’une catégorie de revenus: les revenus du travail. Le champ d’application des dépenses est cependant beaucoup plus vaste (soins de santé pour pratiquement tout le monde, mesures en faveur du marché du travail, solidarité). Il est donc impératif que d’autres revenus que le revenu du travail participent à son financement.

Une meilleure justice sociale à travers les projets de Solidaris et son réseau

Clairement, Solidaris et son réseau associatif agissent au quotidien en faveur d’une meilleure justice sociale au travers de leurs projets, activités et services. Retrouvez l’ensemble des actions et recommandations visant à une plus grande justice sociale via leurs différents sites :

  • Latitude Jeunes : Organisation de jeunesse partenaire de Solidaris ;
  • ASPH: Association socialiste de la personne handicapée ;
  • FPS: Femmes prévoyantes socialistes ;
  • Espace Seniors: Association séniors de Solidaris ;
  • FCPF: Fédération des Centres de Planning familial des FPS ;
  • Solidaris.

Enfin, Solidaris rappelle son crédo : L’État social n’est pas le problème mais la solution aux défis qui sont devant nous. La mutualité rappelle le principe de base de la sécurité sociale : on cotise selon ses moyens et on en bénéficie selon ses besoins.

[1] Laasman, Maron et Vrancken (2019), « Les inégalités sociales dans le domaine de la santé », Direction Etudes, p. 146 ; Institut Solidaris (2019), « Baromètre Confiance et Bien-être 2019 », Direction Marketing, Solidaris, Novembre 2019.
[2] Enquête « European Survey on Income and Living Conditions «  (EU-SILC) de 2018 basée sur les revenus 2017 avec un  seuil de risque de pauvreté de 1.187 euros par mois pour une personne isolée et de 2.493 euros par mois . Pour une famille avec deux enfants.
[3] Service Public Fédéral (2019), « The evolution of the social situation and social protection in Belgium 2019 – Slowly falling behind », Novembre 2019, p. 114.
[4] https://www.institut-solidaris.be/index.php/lereportdesoinsdesante/